jeudi 27 mars 2008

DIRTY HARRY (l'Inspecteur Harry)


L'Inspecteur Harry se place au carrefour de plusieurs influences, et c'est de cette rencontre que provient à la fois la fascination qu'il procure, en même temps qu'un certain malentendu autour de ses intentions.
D'abord initié autour d'une volonté de dénoncer certaines absurdités de la Constitution américaine, le film se veut une oeuvre engagée socialement et politiquement. Il reste des traces de ce projet à travers le personnage du tueur Scorpio, usant d'une violence aveugle à laquelle répond un autre aveuglement, celui, volontaire, des autorités se mettant des oeillères pour préserver les institutions, mais facilitant par là-même certains agissements criminels.
Ce discours est ensuite dilué dans un autre concept, celui du polar urbain brutal, qui prend ses racines dans les oeuvres précédentes de Don Siegel et dans la production de Sam Peckinpah qui donnait alors à tout le monde l'envie de s'essayer à une violence crue et sans fard. Problème, ce qui est né dans les espaces sans loi du far west prend difficilement racine dans une société policée où la logique du bon contre les méchants se heurte aux règles du maintient de l'ordre. D'où une ambiguïté toute naturelle qui soulève déjà le problème de l'auto-justice, auquel Bronson apportera plus tard une solution aussi radicale que décervelée. Mais pour l'heure, cette donne est encore complexifiée par la participation de Clint Eastwood au projet.
Car Eastwood n'est pas une personnalité facile à cerner. Si on peut lire son personnage comme un appel à la réponse sanglante, à une justice ''fasciste'' (parce que justement il connaît la réalité de la rue et sait quelle solution appliquer), il peut aussi être perçu comme l'incarnation parfaite du héros loser, le genre de type qui ne renonce jamais (!) mais n'hésite pas à plonger les mains dans la merde pour n'obtenir aucune récompense. Il y aurait même un peu de John McClane là-dedans...
L'Inspecteur Harry doit donc être abordé comme un film composite, incernable, et extraordinairement efficace, appliquant les règles Hitchockiennes de la dramaturgie à une trame qui servira de modèle à mille copies. La même année se tournait French Connection, preuve du besoin d'alors d'orienter le polar vers un matériau humain décidément bien compliqué...

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