jeudi 27 mars 2008

L'ARMEE DES OMBRES


Adapté d’un roman de Joseph Kessel, l’Armée des Ombres est autant un film de guerre qu’un film réfléchissant le temps et la parole au sens le plus philosophique du terme. L’abstraction s’insinue constamment au cœur du récit : le temps est tantôt classiquement narratif, tantôt tout autre, comme suspendu ou ramassé. Rarement on aura aboutit en France à une telle maîtrise à la fois du temps et de l’espace : l’équilibre est parfait et sa forme novatrice intacte. C’est un film ordonné en une suite de tableaux parfois quasiment autonomes mais toujours montés comme un engrenage dynamique dont aucun des protagonistes ne sort indemne : c’est un voyage actif comme méditatif vers la mort, donnée ou reçue. Melville fait preuve, encore plus qu’à l’accoutumée, d’une mise en scène sobre refusant tout sensationnalisme. Le jeu des acteurs est de même : inspiré, véridique, glacial. Le casting du moindre rôle est pertinent (on n’oublie aucun des personnages, ils ne s’effacent pas de la mémoire) et concourt à rendre l’ensemble d’une tension souvent insupportable en raison de son vérisme tragique. Une oeuvre de mémoire, d’utilité publique presque. Le meilleur film de Melville en tout cas…

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